2.1 Les antigènes du système ABO et les règles de compatibilité pour la transfusion de CGR
C’est le système qui a été découvert en 1900 par Karl LANDSTEINER, observant que le sérum de certains sujets agglutinait les hématies d’autres sujets. Il a donc identifié deux antigènes définissant quatre groupes sanguins selon le ou les antigènes présents sur la membrane et le ou les anticorps systématiquement présents (naturels réguliers) correspondant aux antigènes absents.
Du fait de la présence des anticorps naturels et réguliers, le système ABO est le premier à prendre en compte lors de transfusions. La règle est de ne jamais apporter un antigène contre lequel le receveur possède l’anticorps.
Le schéma classique des compatibilités ABO, en ce qui concerne la transfusion de globules rouges est donc le suivant:
Un concentré de globules rouges (CGR) O peut être donné à un sujet O (transfusion iso groupe), à un sujet A, à un sujet B, à un sujet AB (transfusions compatibles).
Un concentré de globules rouges (CGR) A peut être donné à un sujet A (transfusion iso groupe), ou à un sujet AB (transfusion compatible). Il ne peut être donné à un sujet B ni à un sujet O en raison de l’anticorps anti-A systématiquement présent chez ce dernier.
Un concentré de globules rouges (CGR) B peut être donné à un sujet B (transfusion iso groupe), à un sujet AB (transfusion compatible). Il ne peut être donné à un sujet A ni à un sujet O en raison de l’anticorps anti-B systématiquement présent chez ce dernier.
Un concentré de globules rouges (CGR) AB ne peut être donné qu’à un sujet AB. Il ne peut être donné à un sujet A en raison de l’anticorps anti-B systématiquement présent chez ce dernier, ni à un sujet B en raison de son anti-A, ni à un sujet O en raison des anti-A et anti-B naturellement présents.
La méconnaissance ou le non-respect de ces règles de compatibilité peut entraîner un accident hémolytique de haute gravité avec hémolyse intra vasculaire. C’est pour se prémunir contre cet accident hémolytique ABO, le plus grave (et restant encore malheureusement assez fréquent), que l’on ait à redouter en transfusion, que nous pratiquons en France le «contrôle ultime pré transfusionnel (CUPT)» au lit du patient dont une des composantes est la vérification ultime, au moment de la transfusion de la compatibilité ABO.
Ce contrôle ultime pré transfusionnel s’effectue sur des dispositifs spécifiques et consiste à vérifier au dernier moment la présence/absence des antigènes A et B à la fois chez le patient et sur les hématies à transfuser.
Les antigènes A et B sont des sucres et à ce titre ne peuvent être les produits directs de gènes, ceux-ci ne sachant synthétiser que des protéines. Ils en sont donc le produit secondaire. Un sucre est particulièrement important, c’est l’antigène H qui sert de substrat pour la synthèse des spécificités A et B. En effet, pratiquement tous les individus possèdent l’antigène H et seront donc capables d’exprimer leurs spécificités ABO.
En revanche, il existe d’exceptionnels sujets appelés «Bombay» qui ne possèdent pas le gène H indispensable à la synthèse de l’antigène H. De ce fait, le substrat H n’existant pas, la synthèse des antigènes A et/ou B ne pourra s’effectuer si l’individu possède le(s) gène(s) correspondant(s). Ces exceptionnels sujets ne présentent donc sur la membrane de leurs globules rouges ni antigène A (développeront donc un anti-A dans leur plasma), ni antigène B (développeront donc un anti-B dans leur plasma), ni antigène H (développeront donc un anti-H dans leur plasma), ce qui en fait des receveurs dangereux puisque l’immense majorité de la population possède cet antigène H. Ces sujets ne pourront être transfusés que par eux-mêmes ou leurs semblables. Comme tous les receveurs dangereux (il en existe dans tous les systèmes), leur transfusion devrait être dans la mesure du possible, prévue, organisée et s’effectuer avec des hématies congelées ce qui permet leur conservation quasi-illimitée dans le temps. Il existe un organisme appelé le Centre National de Référence pour les Groupes Sanguins (CNRGS) dont une des missions consiste à assurer la prise en charge et la sécurité transfusionnelle de ces exceptionnels sujets dits «receveurs dangereux».